Ma vie de soigneur vol.3

Par Guaruda
le 12 avril 2022 à 17h37
11 réponses

Bonjour à toutes et à tous.

Alors cette fois utilisons la saisonnalité pour vous parler de ce métier. (Je voulais poster ça en hiver… ha haa..)

L’hiver (ou basse saison) certaines structures sont fermées et il est donc parfois un peu compliqué de savoir ce qu’il s’y passe, je vais donc vous expliquer un peu tout ça sans non plus vous faire crouler sous les détails.

Le plus logiquement du monde c’est pendant cette période qu’une grande partie des travaux vont être réalisé. Forcément pas de visiteurs alors pas de risque d’accident ou de gêne avec ces derniers.

Alors même si la création d’un bâtiment et de son cahier des charges pour accueillir une espèce c’est très intéressant, ça ne sera pas le sujet de ce post. Là nous allons nous intéresser à une autre activité qui est souvent réalisé durant cette période : la gestion des effectifs des pensionnaires. 

Alors forcément si vous vous occupez bien de vos animaux (et vous le faites parce que vous êtes consciencieux et que de toutes manières c’est la Loi) vos pensionnaires vont s’accoupler et faire pleins de petits.

Alors c’est chouette d’avoir des naissances mais au bout d’un moment on risque la surpopulation (et même sans la risquer, on a des effectifs à respecter, on a droit à X individus d’une espèce, pas plus).
Deux méthodes viennent donc éviter cette conséquence d’amour bestiale.

-  Prévenir les naissances à la source.

-  Faire partir les individus en surplus.

Prévenir les naissances ce n’est pas trop compliqué sur le papier, mais vachement plus en pratique.
Soit papa ne rencontre jamais maman parce qu’ils ne sont pas dans le même enclos pendant la saison d’accouplement, voir même ils ne se rencontrent jamais, soit on va stériliser un des deux sexes.

Alors comme je l’ai dit, sur le papier c’est simple, mais certaines espèces ne peuvent pas être stérilisées, les mâles cervidés ne peuvent pas être castrés (problème de pousse des bois) pour d’autres c’est les femelles et de toutes manières c’est des frais vétérinaires et une impossibilité à revenir en arrière si jamais l’espèce se casse la gueule en termes d’effectif et qu’il faut remonter la pente. A utiliser avec parcimonie.
Pour d’autres c’est essentiel que les deux sexes soit présents dans le groupe afin d’avoir des comportements sains et séparer les deux sexes juste avant la période de reproduction implique qu’il doit y avoir une période de reproduction bien définie et que ça ne soit pas non plus trop complexe à faire, ce qui est évidemment rarement le cas.

L’autre solution est de faire partir les individus en surplus. Là aussi c’est plus complexe. Comme dit précédemment, chaque structure à des effectifs maximum pour chaque espèce, donc ça déplace simplement le problème.
C’est pour ça qu’il y a des programmes d’élevages (EEP) qui se concentre évidemment sur les espèces en danger afin de faire varier les génétiques et avoir une traçabilités de chaque individus dans le monde, mais certains programmes servent justes à mieux s’organiser pour gérer les reproductions (ESB).
Cet énorme taf de gestion global, c’est celui d’un coordinateur. Il gère au niveau mondial les déplacements de chaque individus d’une espèce qui bénéficie d’un programme et croyez-moi, faut être vachement organisé, patient et savoir au moins parlez parfaitement l’anglais (je ne le suis pas, mais un ancien collègue est coordinateur pour des espèces de caprins, il pensait que ça allait être facile à gérer comme espèces, ah ah ah…).
Quand un coordinateur dit que machin va partir s’accoupler avec bidule, c’est une décision quasi irrévocable puisque les individus qui sont intégrés dans un programme appartiennent au programme (et plus globalement à l’EAZA, European Association of Zoo and Aquarium) et non à la structure qui les héberge.  Heureusement les coordinateurs sont généralement prévoyant et en remplacement d’un individu qui part, assez souvent on en reçoit un autre avec parfois des petites contraintes du style « pas de repro avec celui-là » ou « cet individus est problématique alors comme vous avez de la place on vous le passe ». Ainsi pas d’enclos vide.

Bon c’est très bien tout ça, mais encore une fois ça ne fais que déplacer le problème, du coup il faut réinjecter dans la « nature ». Pour ce faire encore une fois le coordinateur va choisir des individus qui vont partir en programme de réinsertion. Ces individus vont ensuite être coupé de toutes présences humaines et réapprendre à se débrouiller seules. Puis suivant l’espèce, l’individu et la situation, soit  les petits de ces individus seront relâché, soit c’est tout le monde. Les espèces « proies » sont évidemment plus simple à relâcher que les espèces prédatrices, un lion qui vient fouiller dans les poubelles ça fait toujours mauvais genre.

Un petit aperçue de la possibilité qu'il reste. (On était deux pour déplacer cette biche, lui il a trainer la carcasse tout seul sur 3 ou 4m sans vraiment de problème).

Enfin il reste une dernière possibilité, que l’on utilise sur les espèces « proies », tout simplement la donner à boulotter à son prédateur naturel. Les carnivores des structures zoologiques ont besoin de boulotter de la bidoche, alors plutôt que de leur donner les rebus de consommation humaines (carcasse vidé de la viande, invendu des rayons viandes) donnons-leur ce qu’ils mangeraient à l’état sauvage. Outre l’aspect de gestion vachement plus simple, pédagogiquement c’est vraiment important (je ne compte plus le nombre de fois où l’on m’a demandé si les tigres mangeaient des grosses croquettes pour chat), mais en plus pour les animaux c’est plus équilibré, plus sains et ça occupe l’animal de découper son repas.

D’ailleurs l’abattage d’animaux se fait parfois sur les prédateurs, mais c’est exclusif aux réserves. Ainsi en désignant un individu particulier, une personne en payant un prix conséquent va pouvoir tirer sur un animal (c’est globalement le genre de photo choc que l’on voit). Ceci permet de juguler le braconnage de chasse et de trophée en plus de créer un revenu plutôt bienvenu pour continuer à gérer la réserve (genre en payant les gardes). Et de toute manière sinon ça aurait été un des gardes qui aurait tiré l’animal parce que ce dernier est devenu trop problématique ou alors il s’est déjà trop reproduis.

Le ramassage d'oeufs est une excellente solution pour le contrôle des population en plus de fournir un apport pour d'autres animaux. Je pensais avoir une photo d'une fois où on a anesthésié une hyène pour un transfert dans une autre structure, mais je ne la retrouve plus... faudra vous contenter des poulets.

Voilà, pas d’anecdotes croustillantes cette fois. J’espère que le sujet vous aura quand même intéressé.
J’aime bien ce sujet parce qu’il permet d’expliquer tout plein de notion pas ou peu connue du grand publique et pourtant elles sont très importante. (C’est globalement le genre de connaissance qui manque aux personnes anti-zoo).


+ 17 -

yosegaman Jeune lombric

c'est toujours intéressant de te lire ^^
+ 1 -

Guaruda En réponse à yosegaman Asticot

C'est chouette alors, j'avais un peu peur de ne pas l'hêtre. (^^)
Ravis que ça vous plaise et merci pour vos retours.

(Je me sert du top commentaire pour remercier tout le monde)
+ -4 -

Flaneur Ver TikToké

Toujours très intéressant sinon j’aurais aimé qu’il y ai une loi de bien être afin que ceux et celles qui ne s’accouplent jamais parce qu’on les empêche le puisse mais pas non plus oublié le consentement d’un des deux lol genre lui prévoir un échappatoire.
+ 1 -

Kudsak En réponse à Flaneur Vermisseau

Alloooo ? Y a de la merde dans le tuyau !
+ 1 -

Weng-Weng En réponse à Flaneur Lombrico de la Cruz

On a justement un poste de branleur de cerf qui se libère, je pense que tu as les qualités requises
+ 3 -

doomy Lombric Shaolin

Ça manque de politique mais à part ça c'est toujours un plaisir de te lire.
+ 9 -

BonPublic Vermisseau

On apprend pas mal de choses avec tes chroniques... c'est vraiment sympa de prendre ce temps pour nous informer sur ces sujets.
Merci.
+ 2 -

MarcusKhaine

Merci pour tes infos :) très intéressant.
Jme suis dis "putain de glands les gens parfois" quand j'ai lu ton passage sur les tigres et les croquettes xD
+ 10 -

Oblivionis Taret

Ca doit être vachement technique le ramassage d'œuf de hyène.
+ 1 -

Guaruda En réponse à Oblivionis Asticot

Le côté technique c'est de trouver le nid.
+ 3 -

feyfey Lombrique girafe cougar chienne poule y dort

Merci, j’aime bien tes petites « chroniques ». :)
Perso j’ai la chance de vivre pas très loin d’un zoo/réserve qui travaille énormément sur la réintroduction de petites espèces locales avec un parcours pédagogique plutôt bien fait. Que des espèces européennes adaptées au coin et les soigneurs sont super sympa mais avoir encore un peu plus l’envers du décors grâce à toi c’est vraiment cool. :)
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