Des communistes aux islamistes

Avant la montée des groupes islamistes radicaux, l'Occident faisait face à une série de groupes marxistes révolutionnaires, principalement dans les années 1960-1980. Ces mouvements, souvent soutenus par l'URSS dans le cadre de la guerre froide, cherchaient à renverser les régimes politiques perçus comme impérialistes ou colonialistes. Ces groupes ont eu une présence marquée en Europe, particulièrement en France, en Italie, en Allemagne et dans d'autres pays d'Europe occidentale, où ils ont mené des attentats, des assassinats et d'autres formes de violence pour poursuivre leurs idéologies révolutionnaires.

Les mouvements marxistes en Europe, comme les **RAF (Rote Armee Fraktion)** en Allemagne de l'Ouest, les **Brigades rouges** en Italie, et les **Cellules communistes combattantes** en Belgique, ont été parmi les plus notables. Ces groupes ont été influencés par une idéologie communiste radicale et cherchaient à renverser les régimes capitalistes en Europe tout en s'opposant à l'influence des États-Unis et de l'OTAN. Leur lutte était principalement contre l'impérialisme américain, qu'ils associaient aux gouvernements européens alliés, et contre les régimes jugés corrompus ou autoritaires, qu'ils considéraient comme des marionnettes des puissances occidentales.

Les **Brigades rouges** en Italie, actives des années 1970 jusqu'aux années 1980, ont mené de nombreux attentats, y compris l'enlèvement et l'assassinat du président du groupe **Christian-Democratic Party**, **Aldo Moro**, en 1978. Ils ont aussi été responsables d'une série de meurtres et d'attaques violentes visant des personnalités politiques, des chefs d'entreprise, des policiers et des militaires. Les **RAF** en Allemagne de l'Ouest, souvent appelées les **Bandes à Baader-Meinhof**, ont commis des attentats à la bombe et des assassinats, en particulier durant les années 1970 et 1980. Leur attentat le plus célèbre reste l'enlèvement et l'assassinat du président du patronat allemand, **Hanns Martin Schleyer**, en 1977.

En France, des groupes comme **Action directe** ont joué un rôle clé dans la violence d'extrême gauche des années 1980. Fondée en 1979, cette organisation marxiste-léniniste a mené une série de crimes violents, y compris des assassinats de policiers, de militaires et de responsables politiques, cherchant à renverser l'ordre établi. L'attentat le plus médiatisé de ce groupe fut l'assassinat de **Georges Besse**, le PDG de Renault, en 1986. Action directe justifiait ses actes par la lutte contre l'impérialisme, le capitalisme et la guerre menée par la France au sein de l'OTAN.

Ces groupes marxistes et soviétiques se sont nourris des tensions de la guerre froide, dans lesquelles l'URSS soutenait les mouvements de guérilla à travers le monde, comme le **FMLN** au Salvador ou les moudjahidines en Afghanistan, en fournissant à ces mouvements un soutien idéologique et matériel. La guerre froide a servi de toile de fond pour de nombreux conflits, dans lesquels des mouvements révolutionnaires cherchaient à renverser des régimes qu'ils jugeaient oppressifs, qu'ils soient en Europe, en Asie ou en Amérique latine.

Cependant, avec l'effondrement de l'URSS en 1991 et la fin de la guerre froide, ces groupes ont perdu leur principal soutien idéologique et matériel. Leur influence a diminué, et beaucoup de leurs dirigeants ont été emprisonnés ou tués. La fin du communisme comme idéologie dominante a créé un vide politique et idéologique. C'est dans ce vide que les groupes islamistes radicaux ont commencé à prendre de l'ampleur.

Les groupes islamistes, à l'instar des mouvements marxistes, ont utilisé une forme de guerre par procuration contre l'Occident, mais leur méthode a radicalement changé. Plutôt que de se baser sur une idéologie communiste ou socialiste, ils se sont appuyés sur une interprétation extrémiste de l'islam. Les mouvements islamistes ont cherché à se positionner contre l'influence occidentale en utilisant la religion comme outil de légitimation. Les premiers groupes islamistes radicaux, comme **Al-Qaïda**, ont utilisé le jihad pour justifier une guerre contre les États-Unis et leurs alliés. Des figures comme **Oussama ben Laden**, formées en partie durant la guerre en Afghanistan contre l'URSS, ont repris cette logique de guerre idéologique, mais en la transformant en une lutte religieuse.

En réalité, les islamistes ont saisi l'occasion offerte par la chute de l'URSS et la fin de la guerre froide pour combler un vide géopolitique. Tout comme les marxistes, ils ont voulu utiliser la violence pour s'opposer aux régimes qu'ils jugeaient impurs ou corrompus par l'Occident. Cependant, plutôt que de se battre pour des idéaux socialistes ou communistes, ils se sont tournés vers une idéologie islamiste radicale, qui leur a permis de poursuivre une guerre par procuration contre l'Occident, similaire à la manière dont les groupes marxistes l’avaient fait dans le passé. Ce processus a été particulièrement visible dans des pays comme l'**Afghanistan**, où des combattants islamistes ont été formés pour combattre l'invasion soviétique, avant de se rediriger contre les puissances occidentales.

Le soutien occidental aux moudjahidines pendant la guerre en Afghanistan a indirectement facilité l'émergence de **Ben Laden** et de **l'État islamique (ISIS)**, qui ont repris la logique de résistance violente à l'Occident, mais cette fois au nom de l'islam. Les attaques de **Septembre 2001**, menées par **Al-Qaïda**, et les attentats ultérieurs, ont démontré que les islamistes radicaux avaient repris le flambeau de la lutte contre l'Occident, mais en le faisant sous un prisme religieux plutôt que marxiste.

En somme, bien que les groupes islamistes radicaux ne soient pas les héritiers directs des groupes marxistes, leur formation et leur utilisation de la violence trouvent des racines communes dans la guerre froide. Alors que les groupes marxistes cherchaient à instaurer un système socialiste en opposition à l'impérialisme occidental, les groupes islamistes ont cherché à instaurer un système islamique radical dans le même cadre géopolitique. La fin de la guerre froide et l'effondrement du communisme ont créé un vide dans lequel l’islamisme radical a trouvé sa place, reprenant certaines des dynamiques de guerre idéologique utilisées par les groupes marxistes avant eux.

Envoyé par Flaneur le 28 décembre 2024 à 00h29