Mercredi 08 Avril 2020
Heuuu... truc qui coupe.
Salut à vous, camarades lombriciens.
Comme vous le savez, je suis dans les armes et trucs qui coupent, C'est un peu comme les vélos de magnu, mais c'est vachement moins pratique si on s'assoie dessus. Et suite à quelques discussions sur discord, certains d'entre vous m'ont incité à faire ce post pour vous montrer une partie du boulot, surtout pour un suivi d'une fabrication.
Il manque quelques parties de la fabrication (traitement thermique, trempe, etc.), j'ai préféré ne pas les mettre, soit parce que cela n'avait pas grand intérêt sur photo, soit à cause de photos floues.
Pour ce couteau, je pars sur un modèle brut de forge, lame large et épaisse, en mode "bourrin". Le truc que le gros de la forêt utilise pour poignarder un sanglier,combattre un ours dans un duel de couteaux, ou se couper les ongles.
Au commencement, un ressort d'amortisseur de camion. C'est un acier de très bonne qualité en général (un des meilleurs que vous ayez dans votre voiture d'ailleurs). Malheureusement, il m'est impossible de connaître la composition exacte de celui-ci, mais divers petits tests au cours de la fabrication me permettront de savoir si cet acier est assez bon pour en faire un couteau.
C'est parti, découpe d'un morceau du ressort qui servira à forger le couteau, et premier test : je vérifie la dureté actuelle afin d'avoir un aperçu du taux de carbone de l'acier car c'est l'élément le plus important pour la création d'une lame (partant sur une lame épaisse d'un style brut, l'élasticité ne sera pas importante). Pour cela, je teste la dureté de l'acier à l'état actuel, entre 50 et 55 HRC (c'est un ressort donc il n'est pas trempé). C'est donc plutôt encourageant : c'est déjà la résistance de beaucoup de couteaux que l'on trouve en grande distribution. Mais je ne serais fixé qu'après la trempe (donc, pratiquement à la fin).
On redresse le ressort pour en faire une barre ronde.
Sur ce modèle, j'ai une petite idée du motif décoratif que je voudrais, à savoir quelque chose en accord avec un vieux mur en pierres/murailles. Pour cela, je commence à faire des encoches à chaud au burin sur le manche.
L'aspect une fois fini, je l'ai brossé pour une meilleure visibilité sur la photo.
A ce stade, l'aspect est trop "propre". Pour accentuer le côté pierres anciennes, tout le manche est remartelé.
Manche crossé : j'aime assez ce style qui permet une prise en main adaptée sur plusieurs positions. Le manche sera recoupé plus tard.
A ce stade, voici le rendu (brossé pour la photo).
Vient ensuite la pré-émouture, réalisée au backstand (une sorte de ponceuse à bande). A ce stade, je sais déjà quel type de tranchant aura ce couteau, l'angle est déterminé avec une équation prenant en compte l'épaisseur de la lame et la longueur de l'émouture. Cela permet plusieurs choses, comme équilibrer la lame et limiter les déformations lors de la trempe, les risques de casse, enlever de la matière avant la trempe (donc, lorsque l'acier est plus tendre).
La lame est ensuite trempée. J'effectue une trempe sélective, ainsi j'aurai un tranchant extrêmement dur, mais le reste de la lame gardera de la souplesse. D'ordinaire, une trempe sélective prend au maximum 1/3 de la largeur de la lame, mais compte tenu de la forme de la lame et de ses dimensions, je peux passer légèrement outre ces proportions classiques pour laisser un peu plus de marge à l'esthétique.
Une fois la lame trempée, reprise de l'émouture. Cette fois, plus d'ébauche, je finis aux dimensions définitives. Une fois cette phase faite, le couteau sera déjà tranchant.
Il reste encore le polissage. Je dois bien veiller à limiter la zone de travail pour ne pas dénaturer le couteau et rester dans le concept brut de forge. Pour le polissage, ça se passe à la main avec un grain 400, puis 600, 1000 et 2000 pour finir.
A ce stade, on a un couteau avec une lame polie miroir, pas encore un miroir parfait, mais c'est actuellement assez pour la suite des opérations.
Après plusieurs heures dans le vinaigre, l'acidité a attaqué différemment la lame, révélant la ligne de trempe.Si présence de ligne de trempe, c'est qu'il s'agit d'un acier ayant une teneur en carbone supérieure à 0.6 %. On a donc une haute teneur en carbone. Un test de dureté sur le tranchant permet d'estimer une dureté située entre 60 et 65 HRC. A ce stade, sans connaître exactement la composition de l'acier, j'en sais assez pour savoir qu'il convient très bien à une lame de couteau comme celle de celui fabriqué.
J'en profite pour vous parler du paradoxe du coutelier : c'est lorsque l'on passe le lundi à taper sur une enclume, et le mardi à faire de la couture
Et voilà le rendu fini pour le manche, aspect vieilles pierres :
Dimensions finies du couteau :
Longueur total 29 cm
Longueur du manche 14,5 cm
Longueur lame 14,5 cm
Longueur du tranchant 12,5 cm
Épaisseur au dos de la lame 7 mm à l'entablure.
Largeur de la lame 35 mm à l'entablure
Diamètre du manche 2,1 cm
Poids 486 grammes
Tranchant rasoir.
Voilà pour les grosses lignes, en espérant que ce thread vous a plu. Si vous avez des questions, n’hésitez pas. En passant, désolé pour le logo sur toutes les photos, ce n'est pas que j'aime le voir partout, c'est juste que j'ai déjà retrouvé certaines de mes photos sur d'autres sites ...
Bisous aux lombrikettes
Poignée de main virile aux Lombriks.... Et aux lombrikettes moches.
Mardi 07 Avril 2020
Aujourd’hui le monde est mort 10
LE VENDEUR DE VOITURES
Aujourd'hui le monde est mort. Ou peut-être hier, je ne sais pas. L’explosion démographique mondiale a atteint son paroxysme. Le nombre d’humains sur la planète, qui était de 1,6 milliards au début du XXe siècle, a dépassé 6 milliards au début du XXIe. On a pris conscience d’un phénomène anormal dans les années 2060, quand la population du globe a dépassé les 10 milliards. Le Produit Mondial Brut aurait atteint un niveau cent fois supérieur à celui du XXe siècle. Cette augmentation explosive du PMB était nécessaire pour permettre à 10 milliards de personnes de vivre confortablement, on n’y pouvait rien. En vertu du principe « une voiture par habitant », j’ai vendu des voitures à tort et à travers, et pour finir on n’a plus su que faire des voitures envoyées à la casse. Et pas seulement les voitures, toutes sortes de déchets ont fini par recouvrir toute la surface de la Terre. Un jour, un incendie a éclaté dans une déchetterie de Sibérie. Attisé par les vents d’ouest, il s’est propagé le jour même à toutes les déchetteries de la planète. Impossible de l’arrêter.
La civilisation s’est entièrement consommée. C’est bien normal, la reproduction élargie du capitalisme ne pourrait pas continuer indéfiniment. L’humanité n’a pas réussi à maîtriser son avidité. Les hommes se croyaient intelligents, en réalité ils sont stupides.
Que mon ADN soit réduit en cendres !
Hiroshi SUGIMOTO « Aujourd’hui le monde est mort [Lost Human Genetic Archive] » 2014