Un tableau, une Histoire [n°13] : Les Hasards heureux de l'escarpolette
Tableau de Jean Honoré Fragonard peint entre 1767 et 1769. (exposé à la collection Wallace à Londres)
On y découvre la maîtresse du baron de Saint Julien sur une escarpolette. Un évêque, derrière elle, imprime l'élan de la balançoire afin que son amant en bas à gauche puisse se régaler de la vue en contreplongée (surement un ancêtre de Mylo)
Ce tableau nous raconte son époque. Nous sommes en pleine période libertine. La littérature s'est emparée des mœurs légères de l'époque. (Les contes de La Fontaine, les écrits du Marquis de Sade, les Liaisons Dangereuses,...). L'imprimerie est en plein essor et certaines éditions de ces œuvres sont illustrées avec des scènes érotiques.
La peinture n'est donc pas en reste. À l'époque, de nombreux amateurs commandaient des scènes galantes à libidineuses. Ceci faisant la fortune des meilleurs peintres. Fragonard a donc gagné beaucoup d'argent.
(les débuts d'un modèle vers 1770 exposé au musée Jacquemart-André)
(Jeune fille jouant avec un chien 1772 exposé à la fondation Cailleux)
Revenons à l'escarpolette
Ce tableau est un travail de commande. Le baron de Saint Julien avait même donné les recommandations suivantes : « Je désirerais que vous peignissiez Madame sur une escarpolette qu'un évêque mettrait en branle. Vous me placerez de façon, moi, que je sois à portée de voir les jambes de cette belle enfant et mieux même, si vous voulez égayer votre tableau »
Je n'y est pas reconnu un évêque. Pour moi, cette scène évoque avec beaucoup d'humour un trio amoureux. Le mari cocu (mais content) pousse sa charmante épouse alors que son amant use de subterfuge pour en découvrir les atours. L'évêque renforce le coté libertin de ce tableau.
On peut voir dans le mouvement de va et vient de l'escarpolette une métaphore de l'acte d'amour. La vigueur à accomplir cet acte est souligné par la chaussure qui s'envole.
La statue à gauche se retrouve dans plusieurs toiles de Fragonard. Lorsqu'elle est mentionné dans les titres de l’œuvre, elle est appelé "Amour réprobateur" . Son attitude s'oppose à celle de l'angelot au regard curieux au centre du tableau.
L'amant se cache dans un buisson de fleurs en bouton symbole du sexe féminin. A l'époque, la culotte n'est pas un vêtement courant. Les femmes écartent les jambes et pissent debout. Ce symbole renforce donc l'idée que le spectateur se fait du spectacle observé par le Baron de Saint Julien.
A noter que tout se passe dans la partie basse du tableau. Malgré une végétation luxuriante, notre regard délaisse totalement le haut du tableau pour se focaliser sur le rose de la robe et le blanc de ses jupons.
La parfumerie Fragonard a choisi son nom en référence à ce peintre. la grande majorité de ses tableaux sont d'humeur galante. Ses tableaux badins ne représentent que 20% de son œuvre. Les créateurs de la parfumerie connaissaient très bien les peintures de l'artiste et utilisaient au maximum l'imaginaire associé à ce peintre.
De nos jours, cette image a été reprise au moins deux fois par les prudes productions Disney (Raiponce et Frozen)
L'amant disparait du tableau et l’évêque devient un simple notable. La scène n'est plus qu'une banale scène "champêtre"
De même, lorsque le tableau est reproduit sur des sac ou des bijoux, seul le personnage féminin apparaît.
Il y a même certaine reproductions en poster de très mauvaises qualité dont le bas du tableau semble assombrit de manière à occulter les personnages masculins et focaliser l'attention sur la jouvencelle.
Et je dois bien avouer qu'avant d'en avoir vu une reproduction au musée du Luxembourg. Ce tableau n'était pour moi qu'une simple demoiselle sur une balançoire. Je ne connaissais pas toute la symbolique érotique liée à ce chef-d’œuvre.
Dernière anecdote, (de toute manière personne n'a lu jusqu'ici) ce tableau est interdit de sortie. C'est l'une des recommandations de la famille Wallace lors de son legs. Pour le voir il faut donc se rendre à Londres.
nasnagol v3r fondu
J'espère qu'Henry Hill ne m'en voudra pas de cette incursion dans sa série
Une exposition très agréable au musée du Luxembourg à Paris qui a réveillé ma curiosité pour cette époque. J'y est découvert les contes de La fontaine et je lis les liaisons dangereuses (quoi?ça va! j'avais vu le film! J'allais pas me taper le livre en plus)
Henry_Hill En réponse à nasnagol Ver macht addikkkt
Henry_Hill Ver macht addikkkt
OrlandO Vermisseau
La prochaine fois, mais une petite touche de Paint dessus, histoire qu'on sache ! ^^
Sinon, merci pour ce partage, très beau tableau !
nasnagol En réponse à OrlandO v3r fondu
Pfepelep Vermisseau
Anonymal Vermisseau
le-long-brick Longbric
Ixidor30
nasnagol En réponse à Ixidor30 v3r fondu
Je rapprochais ça à une scène pastorale de toile de Jouy.
Le fait de voir une reproduction convenable m'a permis de prendre conscience de toute la portée érotique du tableau.
Je suis persuadé que ceux qui portent ce motif sur un accessoire ne connaissent pas forcement la symbolique du tableau.
Par contre je suis certain que les animateurs de chez pixar ou disney l'ont placé sciemment. Peut-être une manière de sexualiser leur princesse ?