Hashashin en scred

Dans l’histoire, divers pouvoirs ont utilisé des tueurs ciblés. Les rois français employaient des agents discrets pour éliminer des rivaux, tandis que dans l’empire japonais, les daimyos commanditaient des ninjas pour des missions d’espionnage ou d’assassinat. D’autres cultures eurent des pratiques similaires. Parmi ces groupes, les Hashashin d’Iran se distinguent par leur notoriété et leurs méthodes uniques.

Cette secte ismaélienne nizârite, fondée par Hassan-i Sabbah vers 1090, opérait depuis la forteresse d’Alamut dans les montagnes iraniennes. Son origine remonte à un schisme au sein de l’ismaélisme concernant la succession de l’imamat. Sabbah établit un État indépendant centré sur Alamut, contrôlant un réseau de forteresses. En juin 2025, ce site historique a été évoqué dans certains reportages comme un refuge potentiel du président iranien lors de frappes israéliennes, bien que cela reste non confirmé officiellement.

Le terme Hashashin (حشاشين) est sujet à débat étymologique. Une théorie, popularisée par Marco Polo, le lie à hachich (حشيش), suggérant une consommation rituelle. Des historiens comme Bernard Lewis contestent cette origine, arguant qu’elle serait une invention dénigrante. Le mot dériverait plutôt d’Assassiyun (أساسيون), signifiant "fidèles au fondement" (asās) de la foi. C’est par les récits de Marco Polo, fasciné par leur audace, que le terme entra en français sous la forme "assassin".

Leur recrutement exploitait des techniques psychologiques avancées. Les jeunes recrues (fidā’īs) étaient endoctrinées puis, selon des sources comme Rashid al-Din et Marco Polo, conduites dans des jardins secrets d’Alamut – simulacres artificiels du paradis coranique avec végétation luxuriante, ruisseaux et serviteurs. Après une probable administration de hachisch, elles croyaient avoir accédé au paradis. Réveillées hors du jardin, elles devenaient des "morts-vivants" prêtes à mourir pour y retourner. Les historiens modernes voient dans ce récit une allégorie de leur conditionnement mental plus qu’un fait établi.

Leur mode opératoire était spectaculaire et ritualisé. Sur ordre de leur chef (le "Vieux de la Montagne"), ils assassinaient des dignitaires sunnites seldjoukides ou des croisés après des mois de surveillance. Ils frappaient toujours en public, au poignard, en plein jour – souvent lors de prières ou d’événements publics – pour maximiser l’impact terroriste. Leur signature résidait dans leur absence de fuite : ils se laissaient capturer ou tuer, affichant une sérénité interprétée comme un fanatisme religieux ou un état altéré par des drogues. Cette méthode visait à démontrer leur impunité divine et à dissuader leurs ennemis.

Les commanditaires extérieurs exploitaient leur réputation. Bien qu’agissant souvent pour leur survie politique, les Hashashin acceptaient aussi des contrats mercenaires. Des princes musulmans rivaux ou même des croisés les utilisaient pour éliminer des adversaires gênants, comme en témoigne l’assassinat de Conrad de Montferrat en 1192, attribué à Richard Cœur de Lion par certaines chroniques. Leur loyauté restait néanmoins conditionnelle à leur doctrine.

La fin des Hashashin survint au XIIIe siècle. En 1256, les Mongols de Hulagu Khan assiégèrent Alamut avec des engins de siège modernes. Après trois jours, l’imam Rukn al-Din Khurshah se rendit, espérant négocier. Les Mongols rasèrent méthodiquement la forteresse, massacrèrent sa population et exécutèrent Khurshah. Les derniers bastions tombèrent en 1273, dispersant les survivants et mettant fin à leur influence.

Sources utilisées :
- Lewis, Bernard. The Assassins: A Radical Sect in Islam. 1967.
- Daftary, Farhad. The Ismāʿīlīs: Their History and Doctrines. 1990.
- Polo, Marco. Le Devisement du monde. fin XIIIe siècle.
- Hodgson, Marshall G.S. The Order of Assassins. 1955.
- Rashid al-Din. Jami’ al-Tawarikh. XIVe siècle.
- Wasserman, James. The Templars and the Assassins. 2001.

Envoyé par Flaneur Hier à 12h31